lundi 29 avril 2013

Attaquer un ami gratuitement...

 

… de temps en temps ça soulage.

 

C'est un peu comme insulter un automobiliste parce qu'il s'arrête au feu orange : c'est gratuit, c'est mesquin, mais ça permet de se décharger très efficacement et en clin d'oeil de l'agressivité cumulée sur les derniers jours.

 

Et l'avantage d'un ami, c'est que vous l'avez toujours sous la main (alors qu'un automobiliste qui s'arrête à l'orange ne se croise pas à tous les feux tricolores) (surtout à Paris).

 

Hier, j'avais dû finir en urgence un dossier atroce avec des histoires incompréhensibles de dissection de la carotide intracrânnienne (la gauche, pas la droite) qui m'avaient un peu tapé sur l'encéphale.

 

Alors quand j'ai vu une couverture de magazine pour consommateurs névrosés qui mettait ouvertement en doute la probité du corps bedonnant respectable des notaires, je n'ai pas pu m'empêcher d'en envoyer la photo à Djibé, notaire de son état (du moins est-ce ce qu'il raconte en soirée).


notaire2.jpg 

 

Avec en bonus une légende de mon invention :

 

« Nan, je crois pas nan ».

 

L'avantage, quand vous faites quelque chose de ce genre, c'est que l'ami en question ne se fâche pas.

 

Il ne voit là dedans qu'une flatteuse distinction : vous avez pensé à lui.

 

Et il en est particulièrement touché.

 

La preuve : alors que, normalement, il ne répond jamais à un texto avant 3 ou 4 jours, le temps sans doute de répondre à d'encore plus vieux textos, vous recevez de ces nouvelles dans la seconde.

 

« Ahahaha, je suis sûr qu'avant de me connaître, t'aurais dit oui ! »

 

Vous avez fait d'une pierre deux coups :

 

  • vous vous êtes libéré l'esprit,

     

  • et vous avez resserré les liens avec un ami.

 

Je n'ai pas encore testé, mais je pense que la formule doit être transposable à la famille.  

 

J'attends un article de fond sur Les fonctionnaires sont-ils vraiment incompétents ? et je vérifie auprès de mon cousin. 

mercredi 24 avril 2013

Tout le monde devrait pouvoir partir en vacances

Enfin, surtout mon ficus. 

 

Une semaine d'absence et voilà que je le retrouve le feuillage tout dégarni et les branches lamentablement pendeloquantes...

 

S'il pouvait parler, je suis sûre qu'il me ferait un topo du genre que voilà, cette vie là, elle est trop dure, ce n'est pas celle dont je rêvais quand je n'étais encore qu'un tout petit arbrisseau collé contre le tronc de ma maman, je n'en peux plus, il faut que tout ça finisse maintenant et vite !

 

Et si je le poussais un peu, peut-être même que, du fond de son désespoir, il en arriverait à me reprocher de l'avoir abandonné sans lui laisser ne serait-ce qu'une coupelle d'eau...

 

Là, je dis, mon petit ficus, je t'aime beaucoup (c'est quand même la seule plante qui a réussi à survivre plus de 2 mois chez moi) mais tu y vas un peu fort !

 

Si je ne t'ai pas emmené en vacances, c'est parce que, d'une, tu ne me l'as pas demandé, et de deux, j'ignorais que tu aimais les vacances (parce que, c'est vrai, tout le monde n'aime pas les vacances, regardez par exemple les Japonais, eh bien ils donnent plein de jours de congé à tous leurs patrons, et je pense que leurs bonzaïs doivent faire à peu près pareil, il n'y a pas de raison).

 

Ensuite, une coupelle d'eau, tu ne mâches pas tes mots ! 

 

Normalement tu tiens très bien toute une semaine sans t'hydrater et voilà que, comme par hasard, c'est pile la semaine où je pars que tu me fais un petit épisode de dessèchement surprise.

 

Un peu comme si tu voulais me reprocher d'avoir pris des vacances en fait. 

 

Mais... mais... ne serais-tu pas un tout petit peu jaloux par hasard ?!!

 

Bon, mon ficus et moi, nous n'aurons sans doute pas cette conversation aujourd'hui vu que je pars pour la journée, et sans doute les choses se tasseront-elles par la suite - je le souhaite.

 

Mais on ne peut s'empêcher de ressentir un drôle de frisson glacé dans le dos quand on pense à la fragilité des rapports homme-plante dans ce monde...

 

Un coup de vent et voilà que 2 ans de cohabitation heureuse (de mon côté en tout cas) se trouvent entièrement remis en cause.

 

Méfiez-vous de vos proches, les coups les plus pénibles viennent toujours d'eux.

 

A bon entendeur, ficus. 


 

Ficus-copie-1.jpg

Je ne lui en veux pas (trop), je le mets même en photo.

vendredi 19 avril 2013

Je suis en hélico, je te dépose ?

Je ne sais pas vous, mais moi, ce n'est pas tellement le genre de questions auxquelles je suis habituée.

 

Peut-être parce que je n'habite pas à proximité immédiate d'une piste d'hélicoptère, peut-être aussi parce que mes amis sont un peu plus yacht ou jet privé.

 

Et c'est encore moins le genre de questions qu'il m'arrive de poser autour de moi.

 

Dans ce registre, j'ai beaucoup plus pour habitude de lancer - en toute simplicité - de sympathiques propositions du genre « Je suis à pieds, on fait le chemin ensemble ? » ou « Je prends le métro, tu m'accompagnes ? ».

 

Bref, vous l'aurez compris, quel que soit le moyen de transport, je fais rarement un détour pour les autres (sans doute par manque de temps).

 

Enfin, ça, c'était jusqu'à cette nuit.

 

Chaque soir, comme vous je pense, dès que le Marchand de sable est passé (en ce qui me concerne, il passe plutôt en fin de tournée, sur les 1h - 1h30 du matin), je rejoins mon autre vie où il m'arrive des tas de choses bien plus palpitantes que celle dans laquelle j'écris ce blog.

 

Là-bas, je suis déjà arrivée en pantoufles au travail, je suis retournée au collège, en cours d'histoire, et pas de chance c'était interrogation surprise, j'ai fait un beau mariage en calèche en me disant que j'avais bien tort d'épouser ce type mais que tant pis c'était trop tard maintenant, j'ai vu une montgolfière foncer dans le séjour de l'appartement de mes parents et tuer la moitié des convives qu'ils recevaient, je me suis surprise à rendre mon dernier soupir, et, dernièrement, j'ai aussi pris le car de l'angoisse en direction d'un lotissement abandonné.

 

Et bien hier, cette fois, j'étais aux commandes d'un hélicoptère, en l'occurrence, MON hélicoptère (eh oui, je suis très successful dans cet autre monde).

 

Et voilà que, juste avant de décoller, j'aperçois Vince, un vieux camarade de promotion (les camarades de promotion sont toujours vieux).

 

- « Eh oh Vince, je suis en hélico, je te dépose ? » (Je n'ai pas revu Vince depuis bien un an mais à quoi bon perdre son temps dans de longues discussions stériles et parfaitement convenues – Comment vas-tu ? On a eu un hiver horrible tu ne trouves pas ? - quand on peut simplement AGIR ?!).

 

- « C'est gentil Ginger mais je suis à deux pas. Tu vois cette grande bâtisse de l'autre côté de la route, eh bien c'est là où je dois me rendre pour rencontrer mon client » (Vince a de grosses responsabilités, lui).

 

- « Non mais attends, je ne vais pas te laisser aller à pieds (enfin une occasion d'utiliser mon hélicoptère), je te conduis, tu y seras d'autant plus vite ! ».

 

Vince craque monte dans mon hélicoptère.

 

Sans davantage me poser de questions, un peu comme si j'étais une pro des airs titulaire de sa licence de pilote depuis la guerre du Vietnam, j'enfile mon casque/écouteurs, je mets en mouvement les pales du rotor principal, je relève le manche gauche et nous voilà partis.

 

Grisant me direz-vous de convoyer quelqu'un dans un appareil que vous vous imaginiez jusqu'alors ne pas savoir conduire.

 

Oui, mais, malheureusement, il y a toujours un moment où la triste réalité revient méchamment interférer avec le rêve.

 

Au lieu de conduire mon hélicoptère jusqu'au lieu très voisin du rendez-vous de Vince (souvenez-vous, la grande bâtisse de l'autre côté de la route), voilà que mon absence totale de sens de l'orientation, refait tout à coup surface.

 

Je me retrouve prise dans une vue Google Earth faite de grandes étendues verdâtres atrocement floues.

 

Impossible de me repérer.

 

Je commence à faire comme d'habitude lorsque j'essaie de trouver une direction : je vais n'importe où en me fiant à mon instinct, ce qui me garantit à coup sûr de ne jamais retrouver mon chemin.

 

Tiens, curieux, le paysage se modifie, de grandes étendues rocheuses apparaissent...

 

Ne serions-nous pas désormais perdus en pleine montagne (chouette une nouvelle expérience) ?

 

« Joli le paysage, hein, Vince ! »

(ton faussement décontracté destiné à dissimuler le gros sentiment de malaise qui s'empare de moi lorsque Vince jette, pour la 15ème fois en moins de 10 secondes, l'air passablement préoccupé, un coup d'oeil à sa montre).

 

J'espère que Vince a bien profité de ce petit baptême de l'air, parce qu'à mon avis, le temps que je me pose pour demander mon chemin, son rendez-vous avait déjà dû lui filer sous le nez depuis longtemps.

 

Évidemment, je ne peux pas vous le garantir à 100 % vu que je me suis réveillée avant de pouvoir en faire le constat formel, mais on s'acheminait de façon assez convaincante vers cette hypothèse... 

 

Il ne me reste plus qu'à croiser les doigts pour que, la prochaine fois que je l'aurai au téléphone, il ne se souvienne pas de ce rêve et de la façon dont j'ai gravement nui à ses intérêts professionnels, tout ça à cause d'une bête histoire d'hélicoptère !


 

Helico.jpegAccroche-toi Vince, ça va décoiffer !  

mercredi 17 avril 2013

Moi, je ne cours pas

 

 

Attention, ne vous méprenez pas sur le sens de ce titre.

 

Contrairement à ce qu'il pourrait laisser penser, il m'arrive de courir de temps en temps.

 

Pour attraper le bus, pour télétransmettre à temps ma déclaration d'impôt, pour éviter d'arriver plus d'un quart d'heure en retard à mes rendez-vous, et même parfois – quand je suis vraiment en forme – pour jouer avec mes neveux à qui va atteindre la barrière en premier (c'est toujours moi qui perds).

 

Non, ce que je veux dire par « je ne cours pas », c'est qu'aucune petite case de mon emploi-du-temps hebdomadaire n'est par avance dédiée à la pratique de cette activité physique.

 

Lorsque je cours, ce n'est pas vraiment par choix.

 

Il s'agit d'un comportement que j'adopte par pure nécessité, en général pour remédier à des contingences extérieures à l'origine d'un phénomène de distorsion temporelle se traduisant par une soudaine accélération de l'écoulement du temps, lorsque vraiment aucune autre solution n'est envisageable. 

 

Vous ne me verrez donc jamais, revêtue de mon jogging le plus moche, aller m'ébrouer quelque part dans un coin bien pollué de la capitale, tout ça pour optimiser mon sentiment de bien-être personnel.

 

J'ai depuis longtemps compris que mon sentiment de bien-être personnel passait beaucoup moins par mes pieds que par mon estomac (depuis le cross du collège en fait).

 

Mais comme la course est un peu LE sport national du moment, je suis régulièrement confrontée à la question suivante :

 

« Et toi, tu cours ? »

(question qui fait suite, en général, à un long et palpitant monologue consacré aux meilleurs parcours de la région, aux meilleurs équipements vestimentaires, aux meilleurs régimes alimentaires, etc.)

 

Et jusqu'ici, au lieu de révéler le véritable fond de ma pensée (« Non, tu vois, j'aime bien souffrir mais pas forcément pendant une heure d'affilée en tournant en rond et en risquant de tomber sur un séduisant psychopathe »), je me contentais d'une réponse très diplomate :

 

« Non, je fais du tennis ».

 

Heureusement, jusqu'ici, cette réponse a toujours suffi à tromper la curiosité de mes interlocuteurs et j'ai pu garder mon secret pour moi.

 

Mais je redoutais le jour où l'un d'eux, plus perspicace vicieux que les autres me répondrait :

 

« Et alors ? L'un n'empêche pas l'autre que je sache ! »

 

Aujourd'hui, à la faveur des derniers évènements de l'actualité internationale qui ont volé la vedette à ce brave Cahuzac, je sais exactement ce qu'il faudra que je réponde à ce petit impertinent pour lui rabattre définitivement son caquet.

 

« Oui, mais jusqu'à plus ample informé, personne ne dépose encore de cocottes-minutes sur les courts de tennis, non ?! »

 

Il faut bien le reconnaître, il existe des sports plus dangereux que d'autres...

 

cotcot.jpeg

lundi 15 avril 2013

Que faire lorsqu'on n'a pas de gel douche ?

 

Quand on n'a pas de shampoing, on sait bien qu'on peut toujours aller en chercher dans un gigamarché quelconque de Miami histoire d'avoir le cheveu bien soyeux au moment de pleurer de joie (attention à choisir un bon mascara waterproof) pour accueillir Kim Kardashian (que je ne connaissais pas il y a encore 2 mois et que j'aurai selon toute vraisemblance oubliée dans 3) (un peu comme Gerald Babin en fait).

 

Mais quand on n'a pas de gel douche ??!

 

C'est une autre question bien évidemment !

 

Il ne s'agit plus d'un soin capillaire mais d'un soin du corps et là, personne de la téléréalité ne nous a encore éclairé de ses nombreuses lumières sur la question.

 

Ce qui peut vous laisser un peu désemparé si jamais vous avez le malheur de vous retrouver dans une  pareille situation.

 

Heureusement, grâce à mon expérience personnelle, je suis en mesure de vous dispenser quelques précieuses indications sur la façon dont vous devez alors vous comporter.

 

J'ai la chance de pouvoir partir chaque année - et même plusieurs fois par an - à la montagne, dans un endroit un peu comme un hôtel sauf qu'en fait c'est un appartement, mais que comme ça ressemble quand même un peu à un hôtel, eh bien, quand on arrive, les volets sont ouverts, les lits sont faits, le linge de toilette est en place, et deux petits flacons orange à bouchon gris - un gel douche et un shampoing – sont là à vous attendre dans la salle de bain.

 

Ce qu'il faut savoir c'est que ces deux petits flacons se ressemblent comme des soeurs jumelles.

 

Et aussi que jusqu'à ce séjour, je n'avais pas encore réalisé qu'il y avait un flacon de gel douche et un flacon de shampoing.

 

Il y a un peu plus de 5 ans, la première fois que j'ai pénétré dans cet appartement, j'ai dû déduire un peu hâtivement de cette identité de présentation générale, l'identité non seulement des inscriptions figurant sur chaque flacon, mais aussi l'identité de leur contenant.

 

(Je ne tenais pas encore de blog mais avec le canevas de motifs montagnards traditionnels que j'avais commencé cet été-là et que je n'ai pas encore trouvé le temps de finir aujourd'hui, j'étais déjà excessivement occupée).

 

Pendant 5 ans, entre 15 jours et 3 semaines dans l'année, je me suis donc lavée alternativement avec du gel douche et du shampoing.

 

Et c'est ma soeur à qui je racontais hier au téléphone – entre autres choses - que j'avais bien pensé à emporter du shampoing pour les vacances (je lui ai gentiment dressé à peu près toute la liste de ce que comportait ma valise, histoire qu'elle ait un peu le sentiment d'être en vacances avec moi) qui m'a ouvert les yeux.

 

Mais le shampoing, Ginger, c'était pas la peine, ils en mettent à disposition sur place, tu sais.

 

Oui, maintenant, je sais.

 

Et maintenant, je sais aussi qu'on peut se laver indifféremment avec du shampoing ou du gel douche.

 

On sort de la salle de bain, on sent bon et on a la même sensation de propreté.

 

C'est l'essentiel.

 

Savoir ensuite si l'on est vraiment propre ou pas, c'est autre chose, mais comme c'est très secondaire, rien de grave.

 

Et je tiens à préciser que dermatologiquement parlant, aucun gros problème cutané trop préoccupant ne s'est jusque là déclaré. 

 

Plus la peine donc, dorénavant, de vous encombrer d'un shampoing et d'un gel douche pour les vacances. 

 

Reste à voir si l'on ne peut pas avantageusement remplacer ces deux produits par un liquide vaisselle quelconque, moins cher et fort utile également pour les travaux d'entretien ménager.

 

Je vous tiens au courant...

 

gel-douche.jpg

mercredi 10 avril 2013

Plus tard, je veux faire député

Fut un temps - lointain aujourd'hui - où je voulus successivement être maîtresse d'école, infirmière puis hôtesse de l'air.

 

Prisonnière de vieux schémas sexistes aujourd'hui en passe, heureusement, d'être dépassés (un grand merci à Najat Belkacem de se charger d'expliquer, en petite robe Courrèges, à nos auxiliaires de puériculture, qu'il est préférable de retirer aux petites filles leurs poupées Corolle pour leur mettre des méchants GI Joe entre les mains), je ne disposais pas alors du recul nécessaire pour me choisir une profession conforme à mes intérêts et à mes goûts. 

 

Et comme, finalement, c'est vrai, on ne grandit jamais très vite - voire même on reste un peu enfant toute sa vie - il m'a fallu pas mal de temps pour comprendre pour quel métier j'étais faite vraiment.

 

Je vous avais annoncé que je devais me rendre, un des 25 derniers mercredis (je ne sais plus exactement lequel, ça fait trop longtemps que je ne suis pas revenue sur ce blog), à l'Assemblée Nationale.

 

Eh bien je ne me suis pas dégonflée, j'y suis allée.

 

Et tout ça malgré la pluie, le portique de sécurité, les photocopies de ma carte d'identité, le vestiaire où l'on m'a obligée à laisser toutes mes affaires, téléphone portable compris (ils m'ont repérée au moment où j'essayais de le glisser discrètement dans l'une de mes chaussettes).

 

Bon, vous serez peut-être un peu déçus d'apprendre que je ne me suis pas illustrée en tentant de descendre du balcon où j'étais placée pour rejoindre l'hémicycle, ou en lançant une bombe à eau sur tel ou tel député ou membre du Gouvernement, et que les chances sont minces, du coup, pour que je passe très prochainement au zapping...

 

A défaut de gagner en notoriété, j'ai par contre vécu une formidable révélation intérieure, dont je commence tout juste, maintenant que le choc est passé, à pouvoir parler.

 

Je sais désormais quelle est la suite à donner à ce que j'oserais appeler très pédantesquement (mais après tout mon grand âge me le permet) "ma carrière".

 

Cela s'est imposé en 6 lettres comme une évidence : D.E.P.U.T.E.

 

6 lettres qui vous donnent un passeport pour un pied-à-terre au Palais Bourbon et une petite retraite sympa une fois que vous l'avez quitté une jeunesse éternelle (du moins le temps de votre mandat).

 

La jeunesse qu'est-ce que c'est ?

 

Eh bien, si l'on dépasse un tout petit peu le stade des petits pots et des hochets, c'est sans doute cette faculté d'exprimer pleinement la vitalité bouillonnante dont on est (encore) animé.

 

Il y a la première jeunesse où la vitalité est bien trop bouillonnante pour qu'il soit possible de la contenir d'une quelconque façon (la jeunesse où vous courez dans la forêt tout en ramassant des tas de marrons pour les mettre dans un sac en plastique).

 

Et puis il y a la seconde jeunesse où le volcan est déjà un peu endormi mais reste encore capable de quelques belles petites éruptions de temps à autres (la jeunesse de l'esprit cette fois, parce que, si je prends mon cas, ça fait bien longtemps que je ne cours plus en forêt en ramassant des marrons dans un sac en plastique) (d'ailleurs il n'y a plus de sac en plastique).

 

Notez que les manifestations de cette seconde jeunesse sont alors plus ou moins liées à la qualité du public fourni par les circonstances.

 

Que vous ayez 7, 14, 28, 56 ou 112 ans, un bon déjeuner de famille bien pénible constitue un formidable étouffoir à jeunesse.

 

A l'inverse, une assistance désireuse autant que vous d'en découdre avec la pesanteur de son environnement représente un écho parfait à la voix de la jeunesse.

 

Les plus belles illustrations qu'il m'ait été donné d'en avoir ont incontestablement eu pour cadre les bancs d'école où, bizarrement, un grand nombre d'élèves était en général plutôt partant pour mettre à l'épreuve la patience du corps enseignant.

 

Je me souviens du jour où Théophaste avait décidé de faire bzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzzz-la-mouche pendant toute la durée d'un cours d'histoire (Ouvrez bien les fenêtres les enfants, que la mouche puisse sortir).

 

De celui où Marc-Aurèle étala consciencieusement de la craie sur le siège du professeur de chimie avant son arrivée (Allons jeunes gens, concentrez-vous un peu sur ce que j'écris au tableau).

 

De celui où Jessie, plutôt que de répondre à la question de cours que lui posait le professeur de mathématiques, lui demanda pourquoi c'était toujours les filles en jupe qu'il interrogeait (Non, je ne vois pas, vraiment...).

 

A l'université, dans une spécialité assez féminine et réputée plutôt sérieuse (que n'ai-je étudié le trampoline), j'ai été un peu frustrée de l'absence totale d'atmosphère potache qui régnait dans mon amphithéâtre.

 

Je caricature à peine en disant que le plus grand acte de sédition de mes camarades et moi-même consistait, en cours, à remplir notre grille de mots croisés 20 minutes.

 

Mieux valait que je ne compare pas trop avec le régime que connaissait ma soeur, pendant ce temps là, dans son école d'ingénieur – formation impromptue de chenilles géantes en amphi, trophée ricard-flambi en caddie, concours de "ventre et glisse" sur sol savonneux, etc - si je ne voulais pas voir grandir trop dangereusement mon sentiment de frustration.

 

Heureusement, à l'issue de ces biens mornes études, j'ai eu la chance de réussir un examen qui m'a conduite tout droit dans une école bidon, où, avec mes camarades de promotion, nous tentions de compenser la faiblesse des cours par des activités récréatives et ludiques.

 

Petits bacs improvisés à 15 au dernier rang, "Qui est qui" spécial personnes de la promotion (Est-ce qu'il a un gros nez ? Est-ce qu'il dégage encore des effluves de bière au lendemain d'une soirée ? Est-ce qu'il dort en ce moment au premier rang ?), applaudissements insistants à chaque arrivée d'une personne en retard, concours de mots improbables à caser dans des questions à l'intervenant (concupiscence, radiesthésie et j'en passe), ola spontanée derrière le dos de la directrice quand elle avait le bon goût de passer nous voir, etc...

 

Ce fût une période socialement très épanouissante (intellectuellement beaucoup moins mais je ne sais pas si ça m'a vraiment dérangée).

 

Et puis je suis rentrée dans le monde du travail et là, j'ai compris qu'il me faudrait vite reléguer tous ces passe-temps que j'aimais et dont je n'avais pas encore eu totalement mon compte au rang des souvenirs sympathiques mais hélas défunts.

 

Jusqu'à ce que les contingences de l'existence m'amènent, l'un de ces 25 derniers mercredis, dans l'hémicycle du Palais Bourbon.

 

Là, qu'y ai-je vu ?

 

Des gens.

 

Et plus exactement :

 

- des gens qui adressaient à d'autres gens des questions avec une mauvaise foi consternante, soit pour leur signifier leur plus entière réprobation à travers moult attaques gratuites, soit au contraire pour les couvrir de fleurs et d'éloges au prix d'une cécité quasi complète sur tous les grands sujets d'actualité de ces 15 dernières années,

 

- des gens qui huaient, soupiraient, se levaient, conspuaient, poussaient des cris d'orfraie,

 

- des gens qui applaudissaient, tapaient des pieds, poussaient des clameurs d'enthousiasme, approuvaient bruyamment,

 

- des gens qui s'échangeaient des mots pendant toute la durée de la séance : et vas-y que j'appelle le monsieur de l'Assemblée Nationale pour qu'il transmette mon enveloppe à mon ami le député Machin (Tu as vu si Truc est arrivé ?), à mon camarade le député Bidule (Tu as potassé le projet de loi de demain ? Parce que moi pas, je suis complètement à l'arrache), au doyen le député Duchmol (Au fait, tu le renvoies quand ton formulaire de retraite des députés ? En même temps que tu publies ta fausse déclaration d'impôts ou pas ?),

 

- des gens qui discutaient avec leurs voisins d'hémicycle au lieu d'écouter, qui ricanaient avec eux, qui debriefaient de la soirée de la veille au Baron (ou à la Chandelle pour les plus sportifs d'entre eux), qui ne décollaient pas de leur Iphone, qui admiraient la tactilité de leur Ipad (outil sur-représenté au Palais Bourbon, qu'on se le dise).

 

Bref, des gens qui, même si comme ça, avec tous leurs cheveux grands, paraissaient avoir 75 ans, ne montraient pas plus de signes de sérieux que s'ils en avaient eu 17.

 

Je ne sais pas si c'est très rassurant pour un pays de se dire que ce sont des personnes comme ça qui décident si les emballages en carton doivent être glissés dans les poubelles vertes ou dans les poubelles jaunes, mais une chose est sûre, je ne crois pas qu'il me faudrait beaucoup de temps pour arriver à trouver ma place au milieu d'elles. 

 

Moi aussi, j'aime bien rire, chahuter, m'indigner... vibrer en somme ! 

 

C'est peut-être même ce que je fais de mieux. 

 

Sachant que si cela peut faciliter mon intégration au sein de l'hémycicle, je suis même prête à apporter mon vuvuzela pour égayer un peu l'assistance. 

 

Et ça tombe bien, je ne l'ai pas sorti depuis la coupe du monde de football 2010 (waka waka).