mercredi 19 février 2014

Lueur d'espoir

Il faut le savoir, j'ai une maladie chronique : le coucher (très) tardif.

 

En général, cela survient de la façon suivante :

 

1) 7h30 : le réveil sonne, je tapote péniblement un peu partout au pied de mon lit pour le trouver et l'éteindre, je me lève douloureusement, les paupières encore mi-closes, j'évite de contempler mes cernes dans la glace et je me dis qu'à partir de ce soir, c'est decidé, j'arrête de me coucher à des heures indues.

 

2) 7h30 a 20h : trucs totalement inintéressants par rapport au sujet de cet article (mais sinon vraiment très passionnants pour tout autre article).

 

3) 20h : deux scénarios au choix :

 

a - je reste tranquillement chez moi et je prévois donc de vaquer à mes occupations jusque 23h et, à partir de 23h, de prendre un livre et d'éteindre la lumière dernier délai à minuit et demi,

 

b - je sors avec des amis, et je prévois de rentrer tranquillement à 23h pour prendre un livre et éteindre la lumière dernier délai à minuit et demi.

 

Resultat des courses :

 

- je vaque à mes occupations (travail en retard, coups de téléphone, blog, préparation d'un cake salé pour le dîner avec les amis du lendemain, dvd, surfage d'internet improductif) jusque minuit et demi,

 

ou

 

- je rentre de ma soirée à minuit et demi,

 

et, dans les deux cas, c'est à cette heure là - minuit et demi - que je réalise que j'ai oublié de faire un truc ultra important qui ne peut pas attendre le lendemain, comme réserver un court de tennis, acheter un billet de train, revendre un billet de train, relire le document que m'avait demandé de relire une amie, écrire un mail de remerciements pour la soirée de la veille, finaliser une commande amazon...

 

Le temps de m'occuper de ce petit extra, j'arrive en général sans trop de peine aux environs d'une heure du matin.

 

De là, le temps de me préparer pour la nuit, de lire deux pages des Borgia pour la forme (finalement les histoires de guerre et de stratégie politique, c'est bien trop high level pour moi), l'heure et demi du matin se trouve allègrement dépassée.

 

Me voilà donc, à deux heures moins le quart, achevant péniblement de dégager mon clic-clac, à me dire qu'il ne faudra pas que j'oublie de mettre en pratique tous les conseils santé-beauté de Elle compilés sur dix ans pour espérer ressembler à quelque chose le lendemain, et que si je suis incapable de garder les yeux ouverts sur mes dossiers alors que j'ai 15 échéances absolument imminentes, j'aurais somme toute bien cherché la petite crise d'angoisse qui s'en suivra.

 

A ce moment là, tandis que je me dirige en mode zombie désabusé vers la fenêtre pour descendre mon store (silencieux, je vous rassure, mes voisins ne m'insultent pas encore quand je les croise), mon regard se pose sur le dernier étage de l'immeuble d'en face.

 

La lumiere est allumée.

 

Il est là.

 

Lui.

 

Ce héros perdu dans les ténèbres de la nuit qui, chaque soir, au lieu de se soumettre à la loi inique du sommeil, lutte pour repousser les frontières de l'endormissement. 

 

C'est lui qui me rassure en me disant que, non, Ginger, ce n'est pas bien grave si tu n'as pas éteint ta lumière en même temps que le soleil s'est couché. 

 

C'est lui qui m'encourage en me disant que oui, Ginger, d'une certaine façon, tu fais aussi partie de la Résistance contre les forces des ténèbres. 

 

Qui est-il ?

 

Je ne sais pas.

 

Je ne l'ai jamais vu à visage découvert, pour la bonne et simple raison que tout ce que j'apercois de la pièce qu'il occupe, depuis ma fenêtre, c'est une paire de rideaux rouges de chaque côté de ses vitres, le haut d'une bibliothèque et un plafond crème orné d'un luminaire.

 

Mais cela ne m'empêche pas de l'imaginer.

 

Ma raison me dit souvent qu'il s'agit d'un étudiant en première année de médecine, surchargé de travail et à moitié dépressif, mais mon imagination, elle, se plaît à me le représenter sous les traits d'un poète maudit ou d'un compositeur torturé, que la recherche de l'inspiration maintient éveillé contre toutes les lois de la nature.

 

Je jette un dernier coup d'oeil vers lui avant que mes stores ne fassent définitivement obstacle à mon regard, et je gagne mon lit en me disant que, finalement, se coucher à deux heures du matin passées est un acte riche de sens. 

 

Sur cette pensée réconfortante, il ne me reste plus qu'à m'endormir paisiblement... 

 

... pour une grande nuit de cinq heures et demi de sommeil !

 

Lueur.jpg

En haut à droite : l'antre de l'artiste...

7 commentaires:

  1. Et pendant ces cinq heures et demie, tu dors au moins ? Moi, je veux bien de tes petits cakes salés, ceux réservés pour le dîner du lendemain ! Quand on n’arrive pas à dormir la nuit, faire des gâteaux, c’est le genre d’activité idéale (cela coupe court aux cogitations). Le souci, c’est de tout faire en sourdine, cela prend trois fois plus de temps !

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  2. Merci Ginger de me rappeler, à travers cet article, le texte que je veux t'envoyer pour que tu le relises...

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  3. Peut-être un blogueur maudit ? Sinon, tu devrais sonner, vous avez surement beaucoup à partager (entre minuit et deux heures du matin).

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  4. Il n'y a plus qu'à aller sonner à sa porte en lui disant qu'il vous manque un oeuf pour avoir les bonnes proportions pour votre mousse en chocolat. ("Ca vous ferait plaisir d'en avoir ?")

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  5. Imagine qu'il se dise la même chose ; il ne dormira qu'après avoir acquis la certitude que la belle inconnue a baissé son store.

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  6. Ainsi c'est vous qui habitez en face de moi ? Je me demandais aussi qui faisais partie de la Résistance contre les forces des Ténèbres, mais je suis déçu d'un coup : j'imaginais une jeune fille obligée de rester enfermée dans son appartement à cause d'un enchantement très puissant... Albert (fils d'Alphonsine)

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  7. Je n'avais pas envisagé cette option mais, oui, ça paraît plausible ! Le pauvre, je ne regarderai plus jamais sa fenêtre de la même façon... 

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