mercredi 30 juillet 2014

Conseils beauté

 
Hier, je me suis rendue auprès de l'une des entreprises pour lesquelles je travaille régulièrement depuis un peu plus d'un an déjà.
 
La-bas, parmi l'armada d'employés plus ou moins avenants qui en composent l'effectif, il faut savoir que mon interlocuteur privilégié est une secrétaire âgée d'une bonne soixantaine d'années, Liliane, qui travaille à cet endroit depuis tellement longtemps maintenant qu'on dirait presque qu'elle fait partie des murs.
 
N'allez pas me demander comment on peut avoir le sentiment que quelqu'un fait partie des murs, c'est comme ça, ça ne s'explique pas, c'est tout.
 
Mais la particularité absolument fondamentale de cette secrétaire, c'est qu'elle s'est visiblement prise d'affection pour moi.
 
Peut être parce que je suis blonde comme elle l'était, que j'ai les yeux bleus comme elle les a toujours et que j'ai vécu dans la région dont elle est originaire, elle m'accueille souvent de l'air attendri d'une mère qui retrouve dans son jeune enfant un peu de ce qu'elle fût dans sa prime jeunesse.
 
- Elle est très mignonne ta petite robe écossaise, tu sais elle me rappelle celle que je portais quand j'allais au lycée ! (ton maternel, sourire ému)
 
Passons sur le fait qu'il ne s'agit pas du tout d'une robe écossaise - même s'il y a des rayures de différentes couleurs dans différents sens - et que je n'ai plus tout à fait 13 ans.
 
Dieu merci, j'ai suffisamment de recul sur la vie, le monde et la vérité en général pour distinguer une réflexion à la justesse approximative d'une insulte (mais tout juste).
 
- Tu as vraiment un joli blond tu sais, ai-je eu droit la dernière fois que je suis passée rapporter un dossier, ce serait difficile pour un coiffeur de le reproduire avec tes mèches cendrées. Tu aimerais bien garder toujours tes cheveux de cette couleur, je suis sûre !
 
Là, je me suis retrouvée dans la peau de la Ginger de 5 ans devant qui les dames qui entreprenaient sa maman à la sortie de l'école – le cauchemar de tout enfant normalement constitué – prédisaient, telles de grandes prêtresses de l'Athènes antique, qu'un jour elle foncerait à son tour pour devenir aussi châtain terne qu'elles – sous-entendu : qu'elle rentre dans le rang elle aussi !
 
Je croyais qu'allègrement passée la période de ma petite enfance, ce temps était définitivement révolu. 
 
Mais en fait non, point du tout.
 
Non, puisque même si je n'ai plus tout à fait 5 ans, Liliane arrive malgré tout à discerner encore chez moi, de façon apparemment très nette, le côté poupin et naïf qui me serait resté de ces lointaines années...
 
- Tu as les sourcils très clairs aussi, un peu comme moi, a-t-elle ajouté tout en ôtant ses lunettes pour que je puisse les admirer.
 
Je les ai regardés, et c'était vrai.
 
Ils sont effectivement très clairs. 
 
D'ailleurs on ne les voit quasiment pas. 
 
Et puis, sans même le chercher, mes yeux se sont tout à coup trouvés irrésistiblement attirés juste un peu plus bas, au niveau de ses paupières.
 
Et là, qu'ai-je vu ? 
 
Une horrible déclinaison chromatique, alliant un far à paupière grenat bien insistant– sans doute conçu, à l'origine, par un collectif de sécurité routière, pour compléter la panoplie de survie gilet jaune fluo/triangle rouge réfléchissant de l'automobiliste en panne sur la bande d'arrêt d'urgence – et des cils habillés d'un bleu roi massif, frôlant le bleu de Chartres mais quand même pas tout à fait (dommage).
 
In petto, je me suis évidemment fait la réflexion qu'on pouvait très bien avoir des sourcils blonds et  rater totalement son maquillage.
 
Et je n'ai pas manqué, dans la foulée, de me féliciter du suprême bon goût de mon discret far a paupière rose et de mon léger mascara brun...
 
Mais il ne m'a pas fallu trop longtemps pour me rendre compte qu'en fait, tout le monde ne l'appréciait pas autant que moi. 
 
Je l'ai compris nettement lorsque Liliane a ajouté : 
 
- Tu sais, tu devrais mettre un peu de far à paupière et de mascara, ça souligne quand même le regard, surtout quand on a une peau claire et des cils blonds comme nous !
 
A cet instant, laissant de côté toute réaction d'amour propre relativement au fait que j'arrive à me maquiller sans même que cela se voie, je me suis imaginée avec le même maquillage que Liliane.
 
Ou plutôt, j'ai essayé de m'imaginer avec le même maquillage que Liliane
 
Mais avant que mon esprit ne parvienne à une telle image, j'avais déposé mon dossier dans l'étagère prévue à cet effet, pris congé de Liliane, passé le sas de sortie de l'entreprise et couru comme jamais jusqu'à la pharmacie la plus proche pour me bourrer de psychotropes. 
 
Que mon maquillage ne se voie pas, c'est une chose. 
 
Mais que l'on suscite chez moi des visions horrifiques dont je suis le point central, c'est juste une forme de torture mentale hautement destructrice...
 
La prochaine fois que je retournerai voir Liliane, je m'arrangerai pour discuter de la pluie et du beau temps. 
 
Les risques de dérapage sont quand même nettement mois grands.
 
Pffiou... ce temps de rentrée est vraiment déprimant, Liliane,
tu crois que ça va s'arrêter quand ?!!

mercredi 23 juillet 2014

Vivre à contre-temps

 
Pourquoi louer une villa au soleil à 2.000 km de chez soi quand on peut s'organiser un séjour en cité HLM à moins de 15 minutes ?
 
Pourquoi chercher en supermarché des escargots au beurre persillé surgelés quand on a à portée de main de délicieuses limaces fraîches du jardin ?
 
Pourquoi acheter des robes de plage aux soldes d'été quand on peut s'offrir des tas de collants pour l'hiver ? 
 
Oui, pourquoi ?