jeudi 15 janvier 2015

Jeunesse éternelle


Figurez-vous qu'après avoir un temps travaillé seule, indépendante et intègre, je me suis laissée aller à intégrer, à raison de deux jours par semaine, l'une des sociétés pour lesquelles j'intervenais jusque là ponctuellement.

Officiellement, j'ai fait ça pour avoir accès à certains dossiers que j'aurais eu plus de mal à me voir confier autrement. 

Officieusement, je soupçonne mon surmoi d'avoir accepté un tel arrangement parce qu'il sentait qu'à force de ne voir personne pendant parfois plusieurs heures d'affilée, j'allais peu à peu tomber dans de graves névroses qui me conduiraient, avant qu'il ne soit longtemps, à rejeter tout contact avec les autres et m'amèneraient à me clochardiser tout à fait pour finir un jour par déambuler entre 3h et 5h du matin au niveau de la Porte Saint Martin vêtue d'un grand plaid en crochet orange en insultant les noctiliens de passage. 

Je ne sais pas si je suis effectivement devenue plus équilibrée depuis que je me suis soumise à ce nouveau rythme, mais en tout cas, une chose est sûre, j'ai eu la joie de renouer avec les usages de l'entreprise. 

Le café du matin. 

L'analyse quotidienne de la météo. 

Les commentaires sur l'actualité en temps réel. 

Le compte-rendu hebdomadaire du week-end. 

Le partage de biscuits au sésame. 

Le visionnage des photos du petit dernier.

Autant de moments très beaux, très forts, très intenses, que je ne pensais plus nécessairement avoir la joie de revivre un jour ! 

Mais ce que j'ai pu redécouvrir et que j'avais presque oublié, c'est l'engouement incroyable suscité par les événements organisés par l'entreprise pour motiver les troupes et être sûre de leur dévouement, quoi qu'il arrive - krach boursier, légalisation du cannabis, abrogation du droit de propriété... - pour au moins les trois semaines à suivre. 

Sitôt la sortie annoncée, un vent d'hystérie collective se répand dans les couloirs, les portes s'ouvrent, les collègues s'apostrophent, on entend un peu partout des Hey, Micheline tu as vu l'invitation pour la soirée du vendredi 27 ?, des Jean-Marc, tu vas t'arranger comment avec les enfants ?, et même des Heureusement que je n'ai pas booké ma réservation pour les Maldives cette semaine là, c'aurait été trop bête !... 

A croire que, pour la plupart des gens, il s'agit de LA soirée de l'année, celle que vous attendez au moins 12 mois à l'avance, dont vous rêvez tant de fois que votre imagination semble en connaître déjà tous les détails, et en laquelle vous fondez absolument tous vos espoirs d'un bonheur futur.

Un peu comme la boum de vos 14 ans. 

Sauf que là vous en avez le double, le triple, voire pourquoi pas, pour les meilleurs d'entre nous, le quadruple...

Est-ce à dire qu'on ne vieillit pas en entreprise ?


8 commentaires:

  1. Réponses
    1. J'avais une robe noire sobre avec un sous-pull bleu gris, et bien sûr des escarpins. Autant dire que j'étais parfaitement professionnelle tout en étant très festive, pile poil dans le ton !

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  2. J'adore la photo d'illustration du billet !

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  3. Ca n'est pas très proactif tout ça...

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